Burkina Faso : Mais que renferme cette situation d’état d’urgence pour les populations ?
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, le Conseil des ministres, en sa séance du vendredi 24 mars 2023, a adopté un décret portant déclaration de l’état d’urgence dans huit (08) régions sur les treize (13) que compte le Burkina Faso. Ce décret a pris effet depuis le 30 mars 2023 dans les localités concernées. Mais que renferme cette situation d’état d’urgence pour les populations ?
De l’avis du Conseiller Technique Juridique du Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité, Monsieur Hikoti GNOUMOU, l’état d’urgence est une situation de crise qui permet aux autorités administratives, à savoir le Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité et les Chefs de Circonscriptions administratives, de prendre des mesures exceptionnelles en matière de sécurité et qui sont susceptibles de porter atteinte aux droits et libertés des citoyens.
Autrement dit, il s’agit d’un état d’exception qui donne des pouvoirs exceptionnels aux autorités administratives de prendre des mesures en matière de sécurité pouvant restreindre les libertés publiques. Il ressort des explications du Conseiller Technique du Ministre qu’il existe deux (02) grandes situations dans lesquelles l’état d’urgence peut être déclaré sur tout, ou une partie du territoire national.
Pour le premier cas, lorsqu’il y a un péril imminent qui résulte des atteintes graves à l’ordre public, le Chef de l’État peut déclarer l’état d’urgence par décret, après délibération en Conseil des ministres.
Concernant le deuxième cas, lorsqu’il y a des événements qui présentent un caractère de calamité publique, de par leur nature et envergure (grandes inondations, séismes ou invasion des récoltes par des criquets), l’état d’urgence peut être déclaré.
Quant à la durée de l’état d’urgence, Monsieur GNOUMOU souligne que conformément aux dispositions de la loi 023-2019/AN du 14 mai 2019 portant règlementation de l’état de siège et de l’état d’urgence au Burkina Faso, lorsque l’état d’urgence est déclaré en période de session de l’Assemblée nationale, elle ne peut excéder trente (30) jours. Sa durée maximale est de quarante-cinq (45) jours, s’il est déclaré en période hors session. Toutefois, a-t-il soutenu, à l’expiration de ces délais, si le Gouvernement estime qu’il est toujours nécessaire de maintenir la situation, il lui est fait obligation de saisir l’Assemblée nationale pour demander une prorogation. Ce délai peut encore être prorogé à son expiration et ce, dans les mêmes conditions, a-t-il indiqué.
Lorsque l’état d’urgence est déclaré dans une localité donnée, les Chefs de Circonscriptions administratives de ces localités peuvent prendre des mesures qui sont de nature à restreindre les libertés et droits des personnes. Par conséquent, et pour ce qui est du cas du Burkina Faso, prévient Monsieur GNOUMOU, les populations doivent s’attendre à ce que certaines mesures qui seront prises, portent atteinte à leurs libertés et droits. Toutefois, ces mesures doivent rester dans le cadre de la loi, c’est-à-dire, demeurer des mesures de sécurité.
Aussi, rassure-t-il, les mesures susceptibles d’être prises sont encadrées. En effet, lorsqu’un Chef de Circonscription administrative viendrait à prendre une mesure dans son ressort territorial où l’état d’urgence est déclaré, il devrait d’abord se rassurer que cette décision respecte deux principes : le principe de la nécessité ou d’opportunité et le principe de la proportionnalité. En d’autres termes, la mesure envisagée est-elle nécessaire au regard de la situation qui prévaut dans la localité concernée ? En outre, la mesure envisagée est-elle proportionnelle (adéquate ou adaptée) ? En cas de non-respect de ces deux (02) principes, le citoyen a le droit d’attaquer ladite décision devant le juge administratif.
La situation d’état d’urgence au Burkina Faso est donc encadrée et il y a des garanties données aux citoyens qui peuvent exercer des recours contre les décisions prises par ces Chefs de Circonscriptions administratives. L’état d’urgence n’est donc pas un état de non droit, a conclu le Conseiller Technique Juridique, Monsieur Hikoti GNOUMOU.
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