Le Burkina Faso et les États-Unis relancent leur coopération dans un climat géopolitique mouvant

Washington, Le général Kassoum Coulibaly, nouvel ambassadeur du Burkina Faso aux États-Unis, a remis ses lettres de créance au président américain Donald Trump lors d’une cérémonie marquée par un geste symbolique fort : sa tenue militaire. Ce choix vestimentaire souligne la centralité des enjeux sécuritaires dans les relations bilatérales et reflète une nouvelle orientation diplomatique dans un contexte régional de recomposition.

Ancien ministre de la Défense, Coulibaly a affirmé la volonté de son pays de bâtir un État « plus sûr, plus souverain et plus résilient », en s’appuyant sur ses propres ressources mais aussi sur des partenariats fondés sur l’égalité et la confiance. Dans sa lettre au Département d’État, il a dénoncé la menace persistante posée par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) et l’État islamique au Sahel (EIS), à l’origine de massacres et d’instabilité dans la région.

Cette nomination intervient dans une séquence de réengagement diplomatique des États-Unis au Sahel. Le président Trump a salué la mission de Coulibaly, exprimant le souhait d’intensifier la coopération dans les domaines du commerce, de l’énergie, des mines et des télécommunications.

Le 27 mai dernier, le sous-secrétaire d’État américain pour l’Afrique de l’Ouest, Will Stevens, s’était rendu à Ouagadougou pour transmettre un message officiel du président Trump. Il y avait rencontré le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Karamoko Jean Marie Traoré. Tous deux avaient insisté sur la nécessité d’un partenariat « solide » et « respectueux de la souveraineté », pointant notamment les restrictions occidentales sur l’accès aux équipements militaires. Stevens a promis de s’engager personnellement pour lever ces obstacles.

Ce rapprochement entre le Burkina Faso et les États-Unis intervient alors que les relations avec la France se sont nettement détériorées. Le Burkina, aux côtés du Mali et du Niger, accuse Paris d’ingérence et a quitté la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), jugeant l’organisation instrumentalisée par l’ancienne puissance coloniale.

Dans le même temps, ces régimes de transition renforcent leurs liens avec la Russie. Des instructeurs russes sont désormais présents dans les capitales des trois pays pour appuyer la lutte contre les groupes armés.

Les États-Unis, quant à eux, s’emploient à redéfinir leur présence dans la région. À Bamako, début juillet, Rudolph Atallah conseiller antiterroriste à la Maison Blanche a discuté d’une nouvelle coopération avec les autorités maliennes. À Nairobi, fin mai, le général Michael Langley (AFRICOM) reconnaissait les conséquences du retrait américain du Niger et évoquait un soutien accru aux partenaires sahéliens.

Face à une France en perte d’influence et une Russie de plus en plus active, Washington cherche à se repositionner au Sahel en misant sur le respect mutuel et une coopération moins intrusive. La visite du Premier ministre nigérien Ali Lamine Zeine à Washington en avril avait déjà marqué une reprise du dialogue, malgré la rupture des accords de défense qui avait entraîné le départ des troupes américaines de la base d’Agadez.

Dans ce jeu d’alliances mouvantes, le Burkina Faso apparaît aujourd’hui comme un partenaire stratégique pour les États-Unis, à condition que la promesse d’un partenariat équilibré se traduise en actes concrets.

Stella S.

 

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